Par Alain Rathery

 

Le décor aux poissons ou à la bouillabaisse est sans doute le décor le plus original de la production marseillaise de faïences de petit feu. Jusqu’ici toutes les recherches sur les origines possibles de ce décor (traités d’ichtyologie, œuvres de peintres hollandais, flamands ou napolitains, travaux des professeurs de l’Académie de peinture et de sculpture de Marseille, production antérieure de faïences notamment de grand feu etc..) n’ont abouti à aucun résultat significatif. Ce qui ressort de toutes les analyses des sources possibles d’inspiration des peintres de poissons sur faïence, c’est que les artistes marseillais, habiles dessinateurs grâce à leur formation à l’Académie ou au sein des manufactures, travaillaient essentiellement d’après nature en reproduisant avec beaucoup d’exactitude les poissons locaux qu’ils pouvaient voir à l’arrivée des bateaux de pêche ou sur l’étal des poissonniers.

L’exposition « Marseille au XVIIIème siècle » au Musée des Beaux Arts de Marseille (juin-octobre 2016) a été l’occasion d’une découverte sur les méthodes de travail des peintres de poissons sur faïence. Le Musée des Beaux Arts de Marseille possède en effet dans ses réserves quatre dessins gouachés de forme circulaire représentant des décors de poissons et de coquillages. De manière incontestable, un lien a pu être établi entre ces dessins et des assiettes aux poissons faisant partie d’un service - le plus beau de la production marseillaise - sorti de la manufacture d’Antoine Bonnefoy. L’une de ces assiettes a été présentée lors de l’exposition à proximité de la gouache correspondante : la similitude de la composition ne fait aucun doute.

 

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 poisson 1

Musée des Beaux Arts de Marseille 

 

Deux autres assiettes inspirées de ces gouaches ont pu être également identifiées sinon localisées : l’une appartenant à la collection Louis Beuf a été présentée lors de l’Exposition coloniale de 1922 (n°384 du catalogue de l’exposition), l’autre faisait partie de la collection Marius Bernard (n°225 du catalogue de la collection). Seule l’assiette correspondant à la gouache la moins réussie n’a pas été retrouvée.

 

 poisson 2 louis beuf

Collection Louis Beuf

 

 

 poisson 3

Collection Marius Bernard

 

 Le décor des trois assiettes identifiées est à quelques infimes détails près strictement identique à celui des gouaches qui ont toutes un format circulaire avec des traces laissées par de petits clous. Ces gouaches sont en outre insolées et tachées par des mouches. Il est donc vraisemblable qu’elles étaient épinglées comme modèle dans l’atelier de Bonnefoy et il est possible qu’elle soit de sa main, même si leur qualité est plutôt médiocre pour un artiste réputé comme un excellent peintre.

Cette découverte prouve qu’au moins dans certains cas les faïenciers faisaient des esquisses d’après nature avant de se mettre à peindre sur l’émail selon une technique très proche de l’aquarelle.